Pharmacien-biologiste et ancien interne des hôpitaux, Docteur Seydou Diallo est le coordonnateur de Pastef Yeumbeul Sud et coordonnateur adjoint de la coalition Yewwi Askan à Keur Massar. Dans un entretien qu’il a accordé à la rédaction de Keur Massar Actu, il analyse la situation politique du Sénégal, accusé le gouvernement d’être responsable des incidents enregistrés dans les structures sanitaires et incite l’Etat a revoir à la hausse, le budget de la santé pour mettre en place des hôpitaux de référence pour améliorer les services d’urgence et faciliter l’évacuation des malades.
Keur Massar Actu : La situation politique sénégalaise est tendue. Quelles sont les raisons ?
Docteur Seydou Diallo : A chaque veille des élections, il y a des mouvements qui se manifestent par rapport à la gouvernance du président Macky Sall depuis 2012. On voit des manipulations qui se font par rapport au fichier électoral mais également avec l’avènement du parrainage qui est un alibi pour bloquer certains adversaires politiques.
Tout récemment, on a vu lors des dépôts des candidatures au niveau de la Direction générale des Élections beaucoup de couacs. La DGE avait notifié à certaines coalitions de l’opposition en l’occurrence Yewwi Askan Wi et d’autres formations comme la coalition Gueum Sa Bopp que des manquements avaient été notés.
Pour notre coalition, on avait signalé que la liste majoritaire du département de Dakar ne respectait pas la parité et entre temps ils ont dit que notre liste nationale présentait un candidat qui n’était pas éligible.
C’est après notre recours au Conseil constitutionnel que nous avons eu raison.
Yewwi Askan Wi compte plusieurs leaders. Est-ce qu’on ne risque pas d’avoir des conflits d’intérêt au sein de cette coalition avec des tendances ?
Je ne pense pas qu’il y a tendance au sein de la coalition Yewwi Askan Wi. C’est une très grande coalition qui regroupe plusieurs formations politiques d’origines diverses. Mais, on a fait tout pour essayer d’harmoniser les choix. Comme on dit souvent : « qui choisit élimine ». Tout le monde ne peut pas être éligible. Déjà il n’y a que 165 postes à pourvoir pour les élections à venir.
Lors des élections municipales passées, on avait plus de postes parce qu’il y avait plus de 500 mairies à conquérir. Cette fois, c’est 165 postes au niveau national. Tout le monde ne peut pas être député.
La meilleure solution, c’est de laisser certaines passées pour au moins représenter la population et défendre leurs doléances au sein de l’hémicycle. L’idée, c’est de laisser les candidats choisis aller aux élections et qu’on participe à la campagne pour que notre liste soit majoritaire au sein de l’hémicycle et qu’on impose à la coalition Benno Bokk Yakaar la cohabitation et qu’on anticipe le départ du président Macky Sall pour 2024.
Ousmane Sonko et Barthélémy Diaz ont-ils les mêmes intérêts au niveau de Yewwi Askan Wi ?
C’est différent. Il y a le département de Dakar dont Barthélémy Dias est tête de liste et la liste nationale avec Ousmane Sonko, comme tête de liste.
On va utiliser l’image du président Sonko pour battre campagne. Lors des élections passées, c’est grâce à Ousmane Sonko qui a eu à sillonner beaucoup de communes que la coalition a gagné.
Beaucoup de candidats qui n’étaient pas connus ont eu la chance d’être élus maires. Et je pense que c’est cette stratégie que nous allons adopter pour au moins faire gagner notre liste au niveau national.
Maintenant, il n’y a aucune concurrence entre le maire Barthélémy Dias et le maire Ousmane Sonko. On a besoin d’eux pour que notre liste gagne aussi bien au niveau des départements qu’au niveau national.
Vous aviez déclaré votre candidature pour les élections législatives. Comment avez-vous changé d’avis ?
Au sein de notre parti (Pastef), on fait pour chaque élection des primaires pour le choix des candidats. C’est-à-dire, des candidats qui veulent aller aux élections déposent leurs dossiers. Après la réception des dossiers, on fait des primaires. S’il y a consensus tant mieux. Sinon, la commission nationale d’investiture intervient pour départager les candidats.
Dans le département de Keur Massar, on avait constaté que tous les maires issus de la coalition Yewwi Askan Wi avaient déposé leurs candidatures. Seules trois communes avaient enregistré de consensus. Ainsi, nous avons soumis les dossiers à la Commission nationale d’investiture de la coalition Yewwi Askan Wi.
C’est la conférence des leaders qui a finalement tranché. Ce qui a permis de retenir la candidature de Bara Gaye qui va représenter toute la coalition Yewwi Askan Wi au niveau de Keur Massar.
L’ambition de tout le monde, c’est que la coalition gagne et que le parti au pouvoir soit minoritaire au sein de l’hémicycle.
Nous ne sommes pas obnubilés par des postes. La philosophie du Pastef, c’est la politique autrement et le don de soi pour la patrie.
L’objectif, c’est que le projet aboutisse et que tous les sénégalais trouvent leur compte. Que les crises socio-économiques soient réduites. Que les gens mangent à leur fin, que le chômage enregistre une baisse et que les étudiants qui arrivent à trouver une formation puissent trouver des emplois.
11 nouveau-nés sont décédés dans un incendie enregistré au centre de néonatalogie de l’hôpital de Tivaouane, le 25 mai passé. Comment analyser cette situation ?
Si on analyse profondément la situation, on remarque des manquements dans le système sanitaire. La plupart de ces structures sont des centres de santé qu’on avait érigés en hôpital de niveau un.
Le système sanitaire répond à des exigences d’une pyramide. Il passe de la case de santé aux hôpitaux de niveau 3. Pour chaque niveau, il y a des normes à respecter en fonction du plateau médical et en terme du personnel qualifié.
Malheureusement, ce qu’on note, c’est du rafistolage de la part du gouvernement qui érige des centres de santé en hôpitaux de niveau un. Et pire, les moyens ne suivent pas et en plus le personnel qualifié n’y est pas. C’est pourquoi on note souvent des accidents.
Par rapport à ce qui s’est passé à Tivaouane, on a dit que c’est un problème électrique.
J’aurais suggéré qu’on installe dans toutes les unités de néonatalogies des caméras de surveillance pour qu’on puisse voir ce qui se passe à l’absence du personnel. Ce qui s’est passé à Linguère et à Tivaouane est vraiment déplorable.
Le limogeage du ministre de la santé est juste un début de solution. C’est le ministre de la santé qui exécute la politique du président Macky Sall. S’il échoue, c’est le président Macky Sall qui échoue.
Il faut revoir tout le système sanitaire, mettre les hommes qu’il faut à la place qu’il faut et rehausser le plateau médical au niveau local et au niveau national.
Qui est donc responsable ?
La responsabilité est partagée entre le personnel médical et le gouvernement. En général, l’État doit beaucoup aux hôpitaux qui vivent de la subvention.
Dans les hôpitaux, la plupart des consommables utilisés sont des produits à usage unique livrés par des fournisseurs privés. Si ces derniers n’arrivent pas à faire un bon recouvrement de leurs créances, ils sont obligés de bloquer la chaîne d’approvisionnement et ça provoque des ruptures.
L’État doit trouver des moyens pour augmenter le budget de la santé au Sénégal. Pourquoi ne pas avoir 20% du budget national pour créer un maximum d’hôpitaux de référence au niveau national, améliorer les services d’urgence et mettre en place des héliports dans les hôpitaux pour faciliter l’évacuation des malades.
Le secteur privé est rarement touché par ces genres d’accidents. Pourquoi ?
Par rapport au secteur privé, il y a un cahier de charge à respecter avant d’avoir une autorisation d’exercer.
Le privé ne badine pas avec les moyens et son service procure beaucoup plus de qualité, si on le compare à celui du public. La santé n’a pas de prix mais elle a un coût. C’est pour cela que le privé est beaucoup plus cher.
Le plus souvent, ceux qui se soignent dans les structures privées sont en général dans les IPM ou dans les sociétés d’assurance. Une personne lambda doit débourser beaucoup de moyens pour entrer dans les structures privées. Contrairement à l’hôpital où il y’a le service social qui peut quand même soulager certains patients qui n’ont pas les moyens. C’est pourquoi la qualité de soins est meilleure dans le privé.
Par Oumar Ba
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