L’autopont de Keur Massar, construit pour renforcer la mobilité des personnes et des biens, a provoqué des inondations, pour la première fois, dans plusieurs quartiers des communes de Keur Massar Nord et Keur Massar Sud. Il sert, par ailleurs, de dortoir à des centaines de sans domicile fixe.

En face d’une route secondaire, on retrouve une maison occupant le premier lot de la cité des enseignants de Aïnoumady. Dans cette vieille maison, habite un père de famille âgé d’une soixantaine d’années. Le propriétaire de cette maison a rejoint Keur Massar en 1994. Envahi pat les eaux de pluie, le foyer est presque obsolète. Sur les murs, on aperçoit des fissures et des parties qui présentent de peintures qui cloquent. Le plancher est devenu inégal.

Frappé par les conséquences de la pandémie du Coronavirus et de la guerre en Ukraine, cet homme n’a trouvé de solution que de repeindre les murs, déjà mouillés, pour rassurer les locataires. Dans une tenue vétuste et mouillée de sueur, Serigne Moustapha Niasse nous donne l’histoire des inondations qui risquent de vider plusieurs maisons dans les années à venir si rien n’est fait.

« C’est en 2004 que nous avions enregistré les premières inondations. Depuis lors, la situation devient pure du jour au lendemain. Cette année, en 2022, avec l’autopont, la situation est devenue extrêmement grave. Toutes les eaux de pluie qui traversaient notre cité pour rejoindre les canaux d’évacuation se sont déversées sur nos habitations. Presque toutes les cités de Aïnoumady ont subi les effets néfastes de l’autopont et enregistré beaucoup de dégâts », a-t-il expliqué.

Avec l’abondance des pluies durant les mois de juillet et août qui ont chassé plusieurs pensionnaires de ces maisons, la municipalité et les services décentralisés ont très vite déployé une motopompe pour assurer l’évacuation des eaux de pluie et limiter les dégâts. Conscients de la mobilisation de l’administration, les habitants ont félicité le nouveau maire de Keur Massar Sud qui n’a ménagé aucun effort avec le soutien de l’Agence de Développement Municipal pour soulager les populations.

Même si le dispositif a permis de réduire l’impact des eaux de pluie, Monsieur Niasse a perdu sa chambre à coucher. Son armoire et lits ont été endommagés par les eaux de pluies et celles des fosses sceptiques. Sidéré, il sort tout le matériel pour l’exposer au soleil.

Délégué de quartier de Aïnoumady depuis 1989, El Hadji Medoune Mbaye ne gère plus que le quartier Aïnoumady 2 suite au découpage administratif et la croissance démographique. Témoin de l’évolution des changements climatiques, ce vieux de plus de 70 ans est surpris par les effets de l’autopont.

« C’est l’autopont qui nous a porté préjudice. Avant la construction de cette infrastructure, même s’il y avait de fortes pluies, plus importantes que celles enregistrées en 2022, on était toujours à l’abri », a-t-il fait savoir.

Pour lui, c’est l’autopont de Keur Massar, mis en service en juillet 2022, qui est responsable de leur calvaire, les empêche d’aller à la mosquée et à la boulangerie pour l’achat du pain. « Toutes les eaux de l’autopont chutent à Aïnoumady. On est resté des mois sans aller prier à la mosquée à cause des eaux de pluie qui ont envahi notre lieu de culte », a-t-il dit.

Suite à ces inondations, la boulangerie de Aïnoumady 2 a été fermée pendant quelques jours, car l’accès était quasi-impossible. Plusieurs personnes ont également déserté leurs maisons pour aller chercher refuse ailleurs. Si certaines ont pu regagner leurs maisons et cohabitaient avec les eaux de pluie, d’autres, par contre, attendent toujours que leurs domiciles soient libres pour revenir.

Durant toutes ces dernières années, les eaux de pluies disparaissaient entre 30 et 45 jours après l’hivernage. Cette année, jusqu’à présent (31 décembre 2022), les eaux continuent d’occuper les maisons et les ruelles, occasionnant des opportunités pour les maladies hydriques, moustiques et animaux aquatiques comme des poissons et reptiles de s’installer dans cette banlieue dakaroise.

Les impacts de l’autopont ne se limitent pas seulement aux inondations. Elle touche également la sécurité. Puisqu’il sert actuellement de dortoirs à certaines personnes sans domicile. « Il y a des individus qui passent la nuit sous le pont et provoque l’insécurité aux alentours de l’autopont », a-t-il ajouté.

Même si les autorités responsables de la sécurité publique ont entrepris plusieurs initiatives pour lutter contre le squattage des emprises de l’autopont, les commerçants et personnes sans domicile fixe continuent de s’en servir. Ils deviennent ainsi un danger réel pour les populations.

Aujourd’hui, pour éviter que ces cités cèdent leur place aux flaques d’eaux nées des conséquences de l’autopont de Keur Massar, les autorités doivent agir le plus rapidement possible pour préserver l’intérêt des personnes qui ont vécu ici depuis plus de 30 ans.

By Oumar

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