Président du Mouvement Alliance Nationale pour le Changement, Alioune Badara Seck analyse les résultats des élections législatives du 31 juillet remportées par l’inter coalition Yewwi Askan Wi-Wallu dans le département de Keur Massar.

Acteur de la victoire de l’inter coalition dans la commune de Keur Massar Sud, le SG de l’ANC salué la dynamique de cohabitation qui se dessine et demande la réorientation du budget alloué au programme d’urgence pour l’emploi et l’insertion socio-économique des vers des projets créateurs d’emplois pour lutter contre la pauvreté.

Comment pouvez-vous analyser les résultats du scrutin du 31 juillet dans le département de Keur Massar

A Keur Massar, la campagne s’est passée dans d’excellentes conditions. De même que les élections législatives du 31 juillet. C’est le lieu de féliciter l’administration pour l’organisation de ces élections sans qu’il y ait aucun souci.

Nous avions en face le pouvoir central avec toute la machine du pouvoir et les fonds dont il disposait et déversait littéralement sur le département et sur l’ensemble du territoire national. Mais nous étions confiants parce qu’en fait ce vote était celui du peuple sénégalais.

C’est le sénégalais qui, à travers ce vote, devait s’exprimer et montrer son accord ou son désaccord par rapport à la politique que le président de la République et ses spires mènent depuis quelques années.

Je pense que le vote a été une sanction très lourde pour le pouvoir en place. C’est  un message très fort que le peuple sénégalais a envoyé au Président Macky Sall afin qu’il comprenne qu’une nouvelle dynamique est en place et enfin qu’il puisse prendre de la hauteur et s’élever à la hauteur de la responsabilité qui est la sienne. C’est à dire gérer les affaires de la cité d’une manière qui soit beaucoup plus en phase avec les aspirations du peuple.

Quel est le message que le peuple a envoyé au Président de la République ?

C’est une sanction !

Le peuple a voté pour le Président Macky Sall en 2019. On lui a donné le pouvoir exécutif. Le peuple a décidé aujourd’hui que le pouvoir législatif devrait revenir à d’autres mains, à savoir l’opposition qui est incarnée aujourd’hui par Yewwi Askan Wi à travers l’inter coalition Yewwi-Wallu. C’est une excellente chose pour le Sénégal. Parce qu’aujourd’hui nous vivons une situation qui est inédite au Sénégal. On n’a jamais vécu une pareille situation. C’est une cohabitation qui s’engage. C’est à dire que le peuple élit son président de manière souveraine qui incarne l’exécutif mais également à côté donne le pouvoir législatif à une opposition parlementaire qui va servir de contrôle d’équilibre. Un pays qui marche doit avoir un certain équilibre. Si on n’a pas cet équilibre-là, c’est le laisser-faire. C’est ce qui s’est passé avec le Président Macky Sall qui a  perdu contact avec son peuple. Le peuple lui a rappelé à la raison. C’est le peuple qui détenait le pouvoir et a donné ce pouvoir exécutif au Président et le pouvoir législatif à l’Assemblée nationale et l’Assemblée nationale à Yewwi Askan Wi.

Aujourd’hui, ce qui va couler de source, c’est que le Président de la République, s’élevant à sa responsabilité, devra nommer un Premier Ministre issu des flancs de l’opposition. Parce que si l’Assemblée parlementaire est détenue par l’opposition, de force le Premier Ministre devra être nommé issu de l’opposition et le gouvernement est toujours formé par le Premier ministre tel qu’il est prédit dans la Constitution, la loi fondamentale du Sénégal.

Le taux de participation ne dépasse pas les 50%. Quelles sont les raisons ?

Les taux de participation aux élections législatives de manière historique n’ont jamais été élevés. En 2007, il y avait eu un boycott de l’opposition et cela s’était traduit par un taux de participation qui tournait autour de 30%. En 2012, quand le Président Macky Sall a pris le pouvoir, les élections législatives qui se sont déroulées juste après son élection avaient enregistré un taux de participation qui tournait autour de 30-36%. En 2017, c’est vrai qu’on a eu 53% et je ne sais pas d’où ces résultats sont sortis (rire). Mais là naturellement, on a eu un taux qui avoisine 40%.

Ce qui est important, qu’on est 10, 20, 30 ou 40% de taux de participation, c’est qu’à la fin de la journée qu’on ait la majorité. Et ce qui s’est passé, c’est qu’on a eu une majorité écrasante de l’opposition à travers l’inter coalition Yewwi-Wallu.

Est-ce que les inondations qui ont été notées la veille des élections ont eu un impact sur le choix des électeurs ?

Les inondations ont été un phénomène supplémentaire. Les sénégalais vivent des difficultés depuis 2019. Le bilan du deuxième mandat du Président Macky Sall est catastrophique  à tout point de vue. C’est vrai que certains sont relatifs  à des catastrophes naturelles.

On a eu la pandémie du Coronavirus qui est arrivée en 2019-2020. Suite à cela, le Président a pris certaines mesures mais qui n’ont pas été des mesures les plus efficaces pour faire face à cette pandémie.

Des programmes ont été notamment adoptés par l’Assemblée nationale. C’est le cas, par exemple du programme Xeyu Ndaw Ni. C’est un programme de 450 milliards de FCFA sur trois ans. Pour moi, c’est un programme qui n’est nullement efficace. Parce que les jeunes ne se retrouvent pas avec des emplois durables. Ils se retrouvent avec des emplois précaires.

Il ne sert à rien d’injecter de la mauvaise graine derrière de l’argent mal investi et c’est ce qui est en train d’être fait. On ne peut pas mettre 450 milliards sur trois ans et se retrouver aujourd’hui après un an avec 62000 emplois. Ces 62000 emplois, vous les trouvez où ? A l’UCG (Unité de Coordination de la Gestion des déchets), un peu dans l’environnement et un tout petit peu dans l’enseignement.

Avec ces 450 milliards, il aurait été beaucoup plus loisible pour le gouvernement du Sénégal de redynamiser notre économie. C’est-à-dire mettre en place des entreprises qui pourraient compétir non seulement sur le plan local et dans tous les secteurs. Que ce soit le secteur de l’agro-business, de la construction ou de la fabrication de matériel électronique. C’est-à-dire qu’il nous faut investir dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, des secteurs sur lesquels si vous investissez 100 milliards vous retrouvez avec 100.000 emplois, si vous investissez 300 ou 450 milliards au bout de 3 ans vous devez pouvoir générer au moins 500.000 ou 600000 emplois directs qui pourront après, de manière indirecte, découlée sur 1.200.000 ou 1.500.000 emplois.

Le secteur de l’emploi est très important pour moi parce que je me dis que le Sénégal ne pourra émerger tant que nous n’aurons pas réglé le problème de l’emploi. Tant que nous aurons des jeunes qui seront dans les rues ou bien qui auront des diplômes et qui attendent des recrutements, on ne règlera pas le problème de l’émergence au Sénégal.

Donc les inondations, c’est un point supplémentaire qui s’est ajouté à la litanie de problèmes que nous rencontrons ici au Sénégal, que les jeunes rencontrent, que les populations vivent au quotidien mais c’est un problème majeur et qu’il faudra régler et nous avons proposé des pistes de solutions durant notre campagne et dernièrement avec les campagnes législatives.

Est-ce que les emplois précaires et le chômage ont-été déterminants dans les défaite des Ministres de l’Economie , du Plan et de la Coopération, Amadou Hott et du Commerce et des Petites et Moyennes Entreprises, Aminata Assome Diatta ?

Oui bien sûre. Ils ont eu un impact significatif.

Mais nous avons tellement de problème au Sénégal qu’on ne peut pas prendre un point particulier et dire que cela a causé, en fait, « la chute du régime » mais il est clair que le Ministre de l’économie et le Ministre du Commerce ont été durement sanctionnés ici pour plusieurs raisons. D’abord, il faudrait respecter les populations de Keur Massar. On ne peut pas parachuter des ministres qui sont venus un peu de nulle part, bien qu’il se réclament de la cité, et s’attendre à ce que les populations les suivent comme des moutons de Panurge. Il faut que les gens respectent les populations de Keur Massar, les populations du Sénégal. Je pense que ça a été la première erreur de  Macky Sall de penser qu’on pouvait parachuter un Ministre et que toutes les populations le suivront, une fois qu’ils sont arrivés. C’est de penser, aussi, qu’ils pouvaient acheter les consciences des personnes à travers les milliards qu’ils détournaient de leurs budgets et la troisième erreur, c’est d’être allé vers des personnes également qui, il y a six mois, les jeter en pâtures, les disaient tout le mal qu’ils pensaient d’eux.

Les leaders qui sont là, à Keur Massar Sud et à Yeumbeul Sud qui étaient, on pensait, du côté de l’opposition et qui d’un coup de baguette magique battent campagne pour le pouvoir parce qu’ils ont été reçus par le président de la République, qu’ils ont reçu des véhicules 4×4, qu’ils ont reçu des millions de FCFA pensaient qu’ils pouvaient acheter les conscience des populations de Keur Massar. Les gens ne sont pas dupes. Ils vont prendre votre argent, ils vont bien le manger, ils doivent le manger, et ils vont bien le digérer parce c’est leur argent. Mais une fois dans l’isoloir, ils vont choisir pour leur confiance et ils vont choisir pour leurs enfants.

Est-ce qu’on peut dire que le président s’est trompé sur le choix de candidats ?

Il s’est lourdement trompé. Il est temps aujourd’hui qu’il se réveille et il est temps aujourd’hui qu’il mette en place l’appareil qui prendra la relève en 2024. S’il ne le fait pas, 2024 est à quelques encablures donc on est peut-être à une année et quelques mois de cela. Je pense que le peuple sénégalais réagira encore et prendra toutes ces dispositions pour le faire partir.

Donc, c’est à lui de voir de quelle manière il souhait partir. Je pense que si j’ai un conseil à donner au Président Macky sall, c’est aujourd’hui d’engager des discussions avec l’opposition à travers Yewwi-Wallu et toute l’opposition élargie. Parce que Yewwi-Wallu est aujourd’hui la première force politique du Sénégal. Selon les résultats, tels que nous les voyons, on risque même d’avoir une majorité des députés. On aura entre 85 et 95 députés qui est une majorité absolue parce qu’il nous faut 83 députés pour avoir une majorité et le Président se retrouve avec 30 à 38% des députés.

Si on enregistre une majorité,  de facto, le pouvoir revient à l’opposition. C’est le cas aujourd’hui. Il est normal que ces deux forces qui se partagent l’électorat puissent s’asseoir et discuter.

Il y a une chose qu’on ne peut toucher. C’est le Président de la République.  Il est élu de manière souveraine et il est là jusqu’en 2024. Ce qu’il est conscient, c’est que maintenant l’assemblée parlementaire est une force de l’opposition donc qu’est-ce qui doit se passer ?

L’opposition doit choisir son Premier Ministre qui va être nommé par le Président de la République. Une fois nommé tel que la Constitution le définit le PM nomme son gouvernement en consultant le Président de la République. Donc, on est forcé d’avoir un dialogue, une collaboration, entre l’opposition et le pouvoir et pour que cela se passe, il faut que le Président prenne de la hauteur et comprenne que les sénégalais lui ont lancé un message. C’est à lui de le décrypter et d’en tirer toutes les conséquences.

Quel est l’avenir de l’inter coalition Yewwi-Wallu ?

L’avenir de l’inter-coalition Yewwi-Wallu est entre les mains des sénégalais, d’abord. Parce que c’est les sénégalais qui vont choisir et décider quelle position ils vont leurs confier et derrière quelles élections ils vont mettre ces deux coalitions. Ensuite, on va vers les élections présidentielles. Très certainement, la coalition Wallu aura son candidat et très certainement également la coalition Yewwi aura son candidat. Quoi qu’il en soit, la coalition Yewwi aura son candidat.

 Je pense qu’il faudra qu’un candidat soit issu des flancs de Yewwi plutôt qu’on ait une pléthore de candidats. Si les deux coalitions se présentent, il se peut qu’on ait le même scénario que celui d’hier (le 31 juillet) et là, on va forcément au second tour. Ainsi, toutes les forces de l’opposition à savoir Yewwi et Wallu et toutes les autres parties prenantes se mettront ensemble pour faire face au pouvoir de Macky Sall. Parce que le pouvoir de Macky Sall, c’est un pouvoir qui est fini. Il n’est pas finissant mais fini. Les choses ont démontré cette logique hier (dimanche).

L’ANC a choisi de soutenir l’inter-coalition Yewwi-Wallu pour les élections législatives du 31 juillet. Le mouvement ANC va-t-il soutenir Yewwi Askan Wi pour les élections présidentielles de 2024 ou va-t-il aller seul pour demander les suffrages des sénégalais ?

Sur ce point, j’aimerais apporter une précision très claire. Le mouvement ANC est partie intégrante de la coalition Yewwi Askan Wi. Nous n’avons pas décidé d’apporter notre soutien à Yewwi, nous faisons partie de cette coalition de la même manière que Pastef fait partie de Yewwi Askan Wi, de la même manière que Takhawu fait partie de Yewwi Askan Wi, de la même manière que PRP et les autres mouvements où partis font partie de Yewwi Askan Wi. Nous somme partie intégrante de Yewwi Askan Wi.

Nous étions membre de Yewwi Askan Wi avant les élections locales, avant même les investitures des candidats. Nous avions participé aux investitures. Pour des raisons qui nous sont propres et qui avaient trait à un certain nombre d’objectivités sur le choix des candidats et leurs profils, nous avions décidé d’aller nous-mêmes à la conquête des  voix des populations de  Keur Massar Sud. Passer ces élections, nous sommes revenus dans notre coalition, nous avons créé notre mouvement bien évidemment qui est l’ANC et nous sommes rentrés dans la coalition Yewwi Askan Wi. Donc ce qui est clair, c’est que Yewwi Askan Wi et Alliance Nationale pour le Changement est une collaboration, c’est un même groupe. Les élections présidentielles, nous serons dans le groupe de Yewwi Askan Wi. Ce qui est évident.

Donc vous soutiendriez Yewwi Askan Wi au profit de votre ambition politique ?

Nous sommes dans Yewwi Askan Wi. (Rire)

Par Oumar Ba (weerbijournal@gmail.com)

Rédaction : 77 586 58 43

By Oumar

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