Yeumbeul : un village opprimé
Le village de Yeumbeul vit depuis plus de 15 décennies dans une situation difficile à cause d’un défaut d’infrastructures né d’un manque criard de solidarité vis-à-vis des autorités administratives. Pourtant il est parmi les plus grands villages traditionnels de Dakar et les plus ancrés dans la culture de la famille de Seydina Limamou Laye.
Par Oumar BA, weerbijournal@gmail.com
Avec le Plan Sénégal Émergent, les espoirs étaient permis à Yeumbeul mais actuellement, il fait l’objet de toute forme d’oppression et de négligence. Situé entre la commune de Malika, à l’Est et la commune de Thiaroye à l’Ouest et sur la route des Niayes, la route de la mort, Yeumbeul n’a même pas une ligne de la société Dakar Dem Dikk pour desservir la localité, d’un centre de formation professionnelle, ni un local pour les handicapés et les femmes encore moins d’un lycée pour Yeumbeul Sud. Pire, il n’est pas doté de voies de raccordement avec la VDN 3 (l’accès bloqué par quelques maisons à l’entrée de Gadaye) et l’autoroute à péage située à moins d’un kilomètre.
Cette situation a fortement contribué à l’augmentation de la souffrance des populations. Elle a par ailleurs eu un impact négatif sur les candidatures de la coalition Benno Bokk Yakaar lors des élections municipales et législatives passées (Amadou Hott, Daouda Ndiaye). Ces derniers malgré les fortes mobilisations (avec une enveloppe serait suffisant pour booster la création d’emplois) à travers des caravanes et meeting n’ont pas convaincu les fils et filles du village. Peut-être avec leurs postes de responsabilités et liens avec le Président Sall, Yeumbeul n’a pas senti leurs efforts.
Le projet de l’aménagement et de l’élargissement de la route des Niayes dont la première pierre a été posée en juillet 2016 par le Président de la République, est devenu le premier facteur d’agression et de punition à Yeumbeul. Initiée pour renforcer la mobilité des personnes et des biens entre Keur Massar et liberté 6, limiter les dégâts sanitaires (Cancer, Asthme, pneumopathie etc…) et lutter contre les encombrements, la route des Niayes a provoqué l’inaccessibilité de certains quartiers, la dégradation du parc de l’automobile et surtout pendant la saison des pluies et a empêché des propriétaires immobiliers de reconstruire leurs maisons pour leurs exploitations.
Malgré ses poids religieux et culturels et son électoral, Yeumbeul n’a pas été traité durant des années avec les mêmes avantages que les autres localités du pays.
Yeumbeul dispose également de ressources humaines nécessaires à son développement, si son capital humain ne revendique pas de couleur ou d’obédience politique susceptible de freiner les initiatives de son développement économique et social. A titre d’exemple, pour lutter contre l’insécurité à Yeumbeul, l’Union des Dahira Layenne de Yeumbeul a élaboré une étude pour identifier les causes et solutions de l’insécurité et remis le rapport aux commissaires de police de Yeumbeul Sud, Yeumebul Nord et de Comico.
Le Ministre de l’Economie, du Plan et de la Coopération, Amadou Hott, n’a pas pu apporter des solutions et initiatives à la hauteur des aspirations des habitants de Yeumbeul. Même s’il a élaboré un programme extraordinaire (Yeumbeul Bou Bess à travers ACCES) pour battre campagne lors des élections municipales de janvier 2022. Bara Gaye, député-maire, de son côté a eu du mal à accompagner les jeunes et trouver des pistes de solutions aux manques d’infrastructures socioéconomiques de base et à la fragilité des femmes. Par ailleurs, l’occupation anarchique des voies publiques est devenue son plus grand problème.
En tout cas, les populations du village traditionnel de Yeumbeul continuent de vivre l’enfer et empruntent encore la route de la mort sous le regard impuissant de ses cadres et autorités responsables de l’équité sociale et territoriale.
Nous interpellons, à travers cette publication, toutes les autorités administratives du pays afin que cette situation désastreuse soit un vieux souvenir. Les populations de Yeumbeul méritent de la santé, d’une mobilité parfaite de leurs biens et services et aspirent à de meilleures conditions de vie.
Mamadou Dia : « C’est un projet qui n’est pas sérieux »
Le projet d’élargissement et d’aménagement de la route des Niayes – Liberté 6-Keur Massar – « est un projet qui n’est pas sérieux » et est devenu un parcours du combattant pour les usagers de cette route, les riverains et les commerçants. Ils accusent la Commission départemental de Recensement et d’Evaluation des Impenses d’être à l’origine de leurs calvaires.
Initialement prévue pour deux ans, le projet de deux fois deux voix a été lancé par le Président de la république du Sénégal, le jeudi 21 juillet 2016. Pour une enveloppe de 150 milliards FCFA et financé par la Banque Mondiale, le projet s’étend sur un linéaire estimé à 23 kilomètres avec des voix de raccordement évaluées à 72 kilomètres. L’objectif du projet est d’améliorer la mobilité des personnes et des biens, réduire les mauvais impacts sanitaires et réduire la durée sur le trajet. Il facilitera l’accès des populations qui habitent dans les communes de Malika, Yeumbeul Nord et Yeumbeul Sud à l’autoroute à péage, le TER et celle des autres communes de Keur Massar, de Rufisque et de Mbao d’accéder rapidement au BRT.
Entre Malika, station Yeumbeul et le centre Jacques Chirac de Thiaroye, le collectif des impactés de cette zone des Niayes a recensé 309 propriétaires impactés dont 256 entre Thiaroye et Yeumbeul. A Yeumbeul, 189 concessions sont concernées tandis qu’à Thiaroye 67 maisons (plus 1600 famille) risquent d’être railler de la carte. Parmi tous les impactés de ces localités, on retrouve le mausolée de Amadou Diallo Pithie, des mosquées, des écoles, des pharmacies.
Avec les lenteurs sur l’exécution du projet, 11 personnes sont déjà mortes à Yeumbeul. Elles ne recevront plus leurs indemnisations.
Le préfet de Keur Massar avait appelé les intéressés à venir prendre part aux activités de conciliation avec la Commission départementale de Recensement et d’Evaluation des impenses qui devaient démarrer le 23 août dernier. Si les impactés de Thiaroye ont répondu à cette invitation, ceux de Thiaroye ont catégoriquement refusé de prendre part à cette rencontre qu’ils considèrent comme une provocation et une occasion pour menacer les ayants droits.
Mouhamed Dia : « c’est un projet qui n’est pas sérieux »
Secrétaire général de la fédération des collectifs des impactés (Thiaroye-Yeumbeul-Malika), Mouhamed Dia critique le projet d’aménagement de la Route des Niayes qui a provoqué depuis 2016 énormément de dégâts financiers et sanitaires.
« Au début, les autorités n’ont fourni aucune information aux populations de Yeumbeul et pourtant elles sont les principales personnes concernées. Maintenant, elles se permettent de menacer les personnes qui refusent de se soumettre à leurs forfaitures en soutenant que celles qui refusent de se conformer aux exigences de la Commission seront obligées de se rendre à la Caisse de Dépôt et de Consignation pour récupérer leurs primes… C’est un projet qui n’est pas sérieux », a-t-il dit.
Après plus de cinq années d’attente et sans réponse favorable, le collectif de Yeumbeul a adressé une lettre au Président de la république pour lui notifier la situation des impactés.
Monsieur Dia a évalué les pertes occasionnées par le projet de l’élargissement de la route des Niayes à près de trois milliards FCFA aux 309 impactés entre Malika et Thiaroye.
« Il y des gens qui n’arrivent pas à construire, réfectionner leurs maisons en vue de les exploiter, depuis 2016. Ils sont restés plus de cinq ans sans la mise en valeur de leurs biens. C’est une perte énorme qui est estimée à plus de 1 800 000 par an et par impacté, explique le Secrétaire Général. Les gens ont perdu du ciment, des briques et d’autres investissements parce qu’ils ne peuvent pas s’engager dans la construction de leurs maisons ».
Pour prouver cette valeur, Monsieur Dia à évaluer le prix d’un magasin en face de la route des Niayes à 150 000 FCFA pour celui le moins cher. Sur une année de location, le propriétaire aurait perçu 1 800 000 FCFA au minimum s’il avait le droit d’exploiter sa maison. Sur les six ans, les 309 impacté ont perdu au moins trois milliards trois cent trente sept millions deux cent milles FCFA (3 337 200 000).
Le Secrétaire général du collectif des impactés de Tally Diallo demande à l’Etat du Sénégal de revoir le décret 2010-439 pour répondre aux exigences du marché de la construction immobilière.
« On a rencontré toutes les autorités chargées du suivi du projet et même l’ancien Ministre de l’économie, du plan et de la Coopération, amadou Hott, (…) Jusqu’à présent, rien n’a changé à propos du recasement, de l’indemnisation, de la prise en compte des locataires et des propriétaires de titres précaires, constate Ibrahima Seck.
Nous ne pouvons pas accepté d’être payés sur la base du décret 2010-439 qui est devenu caduc. Entre 2010 et 2022, les prix de denrées alimentaires, les produits de constructions et la main d’œuvre ont enregistré des hausses. Donc le barème doit-être revu à la hausse pour permettre aux impactés de pouvoir construire de nouvelles maisons. »
Déjà à Yeumbeul, 11 personnes impactées sont déjà décédées.
Le transport en commun, le secteur le plus touché
La route des Niayes est devenue un calvaire pour les acteurs du transport en commun du 46ème département du Sénégal. Depuis 2016, le tronçon Tally Diallo-Station Yeumbeul est devenu de plus en plus impraticable et provoque chez les chauffeurs de l’Association de Financement des Transports Urbains des pertes très importantes.
Reportage
Dimanche à la tombée de la nuit, nous sommes au terminus de la ligne 43 de la cité Comico, commune de Yeumbeul Nord. L’ambiance est vive. Les chauffeurs et receveurs préparent leurs bagages pour rentrer. Le gardien en faction aménage un petit espace pour accueillir les jeunes du quartier autour du thé.
Tous les bus déjà stationnés ont déjà fait, dans la journée, la navette entre Ouakam et Comico. Dans un bus Tata, un chauffeur est à l’intérieur et accompagne le mécanicien qui est entrain de faire quelques réglages pour assurer au conducteur que le bus sera près à embarquer dès les premières heures de la matinée du lundi. A coté, un groupe de jeunes garçons est en train de discuter, bien sûr de la politique quand soudain, un jeune d’une trentaine d’années vient demander la voiture qui doit charger pour la destination de Ouakam. La réponse : on a arrêté le trafic. Désolé, le jeune repart pour chercher un autre moyen de transport pour rentrer.
Chauffeur depuis plus de cinq ans, Mouhamed Mbengue assure la navette entre la Cité Comico et Ouakam avec la ligne 43. Il a commencé à travailler avec cette ligne juste avant le début de l’hivernage. Il conduit les nouveaux modèles de bus. Chaque jour, il commence sa journée à cinq heures du matin. Il fait son départ à la cité Comico. Avec la situation de la route des Niayes et les embouteillages récurrents les matins, il n’arrive à Ouakam qu’entre huit heures et neuf heures, soit une durée de plus de trois tours d’horloge.
Monsieur Mbengue regrette cette situation. La durée entre ces deux localités permet à un voyageur de quitter la ville de Touba et de rejoindre Dakar s’il emprunt l’autoroute à péage Ila Touba. Les causes de ces retards sont dues à la dégradation de la route des Niayes et surtout entre la station Yeumbeul et Tally Diallo. « Thiaroye-Yeumbeul est la partie la plus difficile du trajet. Il n’y a même pas de route digne de son nom. Actuellement je ne fait que deux navettes par jour » explique-t-il.
Lors des inondations, plusieurs automobilistes ont été obligés de stationner leurs bus et d’attendre que la situation s’améliore pour reprendre leurs activités. Les conséquences sont nombreuses puisqu’il arrive souvent que les chauffeurs, journaliers, restent durant deux ou trois jour sans travail. « Quand il y a de fortes pluies, nos patrons nous demandent de garer les voitures afin d’éviter certaines pannes. Ce qui est difficile pour nous, les journaliers et qui doivent assurer les dépenses quotidiennes de notre foyer ».
Avant l’hivernage, les nids de poules n’avaient pas un impact majeur chez les automobilistes à cause des campagnes de remblaiement pour combler les cavités avec des gravats. Avec les fortes pluies, ces derniers sont devenus beaucoup plus importants et provoquent énormément de problèmes chez les chauffeurs et les usagers de la route.
Au terminus de la ligne 68, les chauffeurs se plaignent comme ceux des lignes 43, 73, 52, 81 etc. Conducteur de la ligne assurant la navette entre Tally Diallo et Sebikotane, Harouna perd, chaque jour, plusieurs minutes entre ces deux terminus. Au lieu de faire une heure et trente minutes à deux heures, actuellement il assure ce trajet avec près de 180 minutes. « C’est très difficile pour nous. Près de la moitié des bus qui faisaient la navette entre Sébikotane et Tally Diallo sont aux garages pour réparation. C’est pourquoi, nous n’arrivons plus à assurer correctement le service de transport en commun, se désole-t-il. Avec la gravité des pannes, nos camardes sont obligés de rester des jours sans travailler puisque les propriétaires n’arrivent pas à trouver des moyens pour payer les mécaniciens ou pour changer certaines pièces défaillantes. »
Pendant cette période, les mécaniciens et tôliers se frottent les mains et cette situation, même s’ils ne la souhaitent à personne, les permet quand même d’en tirer profit et des réaliser des économies. Chez Mamadou Sy, c’est la ruée vers ses services depuis le début de l’hivernage. Chaque jour, il travaille de huit heures à 20 heures et n’arrive pas à épuiser les commandes des transporteurs en commun et des particuliers.
« Les nids de poule provoquent beaucoup de désagréments aux automobilistes. Ils entrainent la cassure des lames et autres pièces des véhicules. Nous en profitons, même si on ne souhaite pas de désagréments à ces personnes qui sont nos clients et partenaires, explique le tôlier. Il y a des chauffeurs qui n’arrivent pas à changer les pièces abimées ou payer le coût de la réparation. Etant nos fidèles clients, nous les accompagnons avec des faveurs pour faciliter la réparation et les permettre de payer par crédit puisque la situation est difficile pour tout le monde ».
Une pièce de lame d’un bus cassé en cours de route doit obligatoirement être changée. Pour le faire, le titulaire de la voiture doit débloquer 100 000 FCFA pour avoir un paquet de lame. Le prix du montage peut varier entre 25 et 50 000 FCFA. Ce qui n’est pas donné à n’importe quelle personne. Les autres matériels comme les demi-arbres coutent chers et avoisinent les 80 000 FCFA.
Assis sur un bidon vide, un jeune écrit sur une feuille blanche en carreaux les numéros d’immatriculation des voitures par ordre d’arrivée. Son travail consiste à assurer la régulation des véhicules de la ligne 68.
Le régulateur confirme les propos du chauffeur et regrette la situation qui provoque la chute des recettes et augmente la durée entre les départs de deux voitures. « La route des Niayes nous cause beaucoup de préjudices. La plupart de nos lignes sont dans les ateliers des mécaniciens, tôliers ou de peintres pour des besoins de réfection. Nous enregistrons un manque de trois à quatre bus par jour depuis le début de l’hivernage, note Ousmane Ndour. Le temps de régulation a également connu des perturbations puisque les bus mettent plus de trois heures pour un seul trajet et dans un même sens alors qu’ils faisaient auparavant moins de deux tours d’horloge ».
Le régulateur a constaté également beaucoup d’altercations entre les chauffeurs et les passagers, d’une part et les receveurs et passagers, d’autre part. Ces échanges sont le résultat de surcharge et de la durée au cours du voyage.
Route des Niayes : obligés de quitter, les impactés réclament des indemnisations et accusent l’AGEROUTE d’être le responsable
Le projet d’élargissement de la route des Niayes, au-delà des lenteurs dans son exécution, provoque des inquiétudes chez les impactés et pour la plupart les titulaires de titres précaires, les locataires et les commerçants.
Reportage
Le collectif des impactés de Yeumbeul et Thiaroye accusent l’Agence des Travaux et de Gestion des Routes, la Commission départementale de Recensement et d’Evaluation des Impenses d’être responsables du blocage de l’évolution de leur situation. Ils demandent jusqu’à présent un site de recasement, l’indemnisation de tous les impactés du projet (locataires, propriétaires de titres précaires), l’augmentation du barème issu du décret 2010-439 pour suivre l’évolution de l’Indice harmonisé des prix à la consommation. Pour accélérer la procédure, les impactés de Yeumbeul ont refusé de répondre à la conciliation et adressé une lettre avec leurs amis de Thiaroye au président de la République qui reste toujours sans réponse.
Le 21 juillet 2016, le Président de la République a posé la première pierre pour l’aménagement et l’élargissement de la route des Niayes. Sur un linéaire de 23 kilomètres, la route des Niayes devait relier le rondpoint Liberté 6 à la station Shell de Keur Massar en 24 mois. Financée à hauteur de 150 milliards FCFA, l’exécution du projet a finalement accusé plus de quatre années de retard et accentué la souffrance des habitants des communes de Yeumbeul, Malika et Thiaroye, pour la plupart des cas.
Aujourd’hui, les travaux avancent toujours à petit pas. Après Malika-Keur Massar, c’est autour de Malika-Station Yeumbeul de revivre le calvaire des engins et des inondations issus de la route dont la reprise des travaux a coïncidé avec le début de l’hivernage.
Dès le début du lancement du projet, toutes les personnes physiques et morale susceptibles d’être affectées par la libération des emprises, des animaux sauvages et arbres ont été recensés pour faire l’objet d’indemnisation une fois le démarrage du projet. Six années plus tard, les impactés ne savent toujours pas à quel saint se vouer.
Le vendredi 14 octobre 2022, le collectif des impactés de la route des Niayes, section Tally Diallo, a organisé une manifestation pour dénoncer la démarche des autorités responsables du projet et réclamer le recasement des propriétaires de maisons, l’indemnisation de toutes les personnes impactées (propriétaires, locataires et commerçants), la mise à jour du barème du décret 2010-439. Cette manifestation intervient quelque jour après la rencontre entre le collectif et les autorités (Commission départementale de Recensement et d’Evaluation des Impenses-CDREI) sur les séances de conciliations qui ont démarré le mardi 23 août 2022 à la préfecture de Pikine. (communiqué de presse du 19 août 2022).
Vendeur de café depuis les années 2000, Saliou Faye a pris part à la marche organisée par le collectif des impacté de la route des Niayes de Thiaroye Tally Diallo pour dénoncer la décision des autorités responsables du projet. « Je travaille ici en tant que vendeur de café et je tire profit de cette activité. C’est grâce à elle que j’ai eu à me marier et à organiser des cérémonies de baptêmes de mes enfants, a-t-il expliqué. Nous déloger sans indemnisation, c’est un massacre qui ne dit pas son nom. Nous voulons partir mais bien sûr avec de quoi se déplacer pour investir ailleurs ».
Un ancien émigré a, grâce à ses économies, eu à acquérir un petit terrain d’une superficie de 22 mètres sur 8 à côté d’une station de service non loin du rondpoint Tally Diallo vers les années 1970. Titulaire d’un titre d’occupation, Andalla Mbengue risque d’être délogé et de perdre son droit réel. Tout ce que les autorités lui ont garanti, c’est le remboursement de son bâti. Ces dernières ont refusé de prendre en compte, selon le collectif des impacté, le prix du foncier pour la majorité des impactés qui ne disposent pas de titres fonciers. « Nous déplorons ce que les autorités veulent faire en nous imposant la force. Dire que ce sont seulement les propriétaires de titres fonciers qui auront droit à l’indemnisation du foncier est aberrent. Nous sommes là et nous refusons de partir sans l’indemnisation qui prend en compte le bâti et le foncier », a insisté le sexagénaire qui se dit prêt à être mis en terre avec le projet si l’Etat ne revient pas sur sa décision.
Titulaire d’une place qui abrite un multiservice au rondpoint Tally Diallo depuis 2012, Ndeye Penda Gueye actrice de développement contribue fortement à la lutte conte le chômage des jeunes grâce à sa boite. Elle aussi n’a reçu aucune garantie sur une possibilité d’indemnisation avant de quitter sa place qui sera raillée d’un moment à l’autre. « On veut nous faire partir sans indemnisation en nous disant que c’est un domaine national. C’est inadmissible », soutient la SG adjointe.
Titulaire d’un contrat de location depuis près de dix ans, Madame Gueye n’a aucune idée sur son avenir. « On a investit toute notre économie. Certains ont acheté des clés à des millions de FCFA et ont fait la réfection des locaux. Aujourd’hui, on vient nous dire que nous ne sommes pas concernés par les indemnisations », a-t-elle ajouté.
L’impactée est à la recherche depuis le mois de mai dernier d’un local pour déménager. Jusqu’à présent, elle n’arrive pas à trouver un local adapté pour les activités de transferts d’argents.
Saliou Diouf est tapissier depuis 2004 à côte de la station Tally Diallo. Il a les mêmes préoccupations que sa voisine. « Ou est-ce qu’on va aller si on n’est pas accompagné, se pose-t-il la question. Nous réclamons nos droits pour qu’on puisse aller chercher ailleurs des places disponibles afin qu’on puisse continuer nos activités ».
Vendeur de tissus et établi en face de l’axe Tally Diallo-Police Thiaroye en 2016, Niouga Diagne est locataire comme la majorité des commerçants de la banlieue dakaroise. Il emploie près de 20 personnes et paie entre 2500 et 5000 par jour et par employé. Pour occuper le magasin de stockages de production et d’exposition de ses produits, il a payé 650 000 au départ en guise d’investissement. Aujourd’hui, il paye chaque fin du mois 150 000 FCFA. « On ne sait pas où aller, s’inquiète-t-il. Si on quitte ici, on risque de perdre notre clientèle et on met fin à des activités de toutes les personnes qui travaillent avec nous et donc augmenter le chômage ».
Tous ces acteurs de la vie économique, qui soutiennent plusieurs foyers et contribuent à la cohésion sociale et au développement économique de Thiaroye et ses environnants, méritent beaucoup plus de considération et d’accompagnement pour maintenir leurs activités et inciter d’autres jeunes à investir au Sénégal.